Formez-vous en apiculture et faites venir les abeilles au zoo

On entend souvent dire que les abeilles sont des insectes en voie de disparition, en Europe tout au moins. Il est vrai qu’en général les populations d’insectes diminuent du fait de la modification du paysage et de l’emploi massif des insecticides en agriculture intensive. Face à cette raréfaction, de plus en plus d’initiatives sont prises. Ainsi, lorsque l’on travaille dans un parc zoologique et que l’on est intéressé par les projets de conservation, il est tout à fait légitime de souhaitez attirer et loger des abeilles dans son parc animalier.

Nous présenterons dans cet article, l’intérêt d’accueillir des abeilles mellifères dans un jardin zoologique, et les mesures à prendre pour que ce projet se déroule pour le mieux.

Les abeilles mellifères sont d’importants pollinisateurs qu’il est nécessaire de préserver. Mais bien d’autres insectes sont dans des situations bien plus préoccupantes. Source : Pixabay

Les abeilles mellifères ont-elles besoin de vous ?

Les abeilles mellifères sont l’une des centaines d’espèces d’abeilles que l’on retrouve en France. Mais la plupart sont de discrets pollinisateurs qui ne forment pas de bourdonnantes colonies. Et peu nombreuses sont les personnes à connaître leur existence.

Certaines de ces espèces sont en voie de disparition et pourraient souffrir d’être mises en concurrence avec les abeilles mellifères (Apis mellifera) dans un contexte où les ressources alimentaires (miel et pollen) se font de plus en plus rares.

Renseignez-vous auprès d’une association naturaliste, afin de connaître les possibilités pour venir en aide aux abeilles les plus en danger. Il est sans doute possible de créer pour elles des abris adaptés. Les hôtels à insectes lorsqu’ils sont bien réalisés et qu’ils sont bien localisés, peuvent recevoir de nombreux locataires. Ils contribuent au maintien de populations qui ont du mal à trouver des abris adaptés.

Des abris comme cet “hôtel à insectes” permettent de dynamiser certains milieux où les abeilles solitaires ont du mal à se loger. Source : Pixabay.

L’abeille mellifère a besoin d’attention. Il existe plusieurs sous-espèces d’Apis mellifera, et beaucoup de celles qui sont gardées par les apiculteurs professionnels ou amateurs sont exotiques. Ou bien il s’agit de races sélectionnées pour leur productivité et leur douceur de tempérament comme l’abeille Buckfast.

Mais il existe une sous-espèce indigène en France. C’est l’abeille noire connue des entomologues sous le nom scientifique d’Apis mellifera mellifera. Cette abeille se raréfie et est menacée par l’hybridation avec d’autres sous-espèces étrangères d’abeilles comme l’abeille italienne ou l’abeille du Caucase.

Heureusement, il existe des conservatoires pour protéger cette diversité intra-spécifique. Le plus connu est celui de l’île d’Ouessant. Les souches d’abeilles noires y sont protégées par l’insularité. La même situation se retrouve en Corse, où l’écotype local d’abeille noire est protégé, car les importations d’essaims du continent sont interdites. Pour en savoir davantage sur les activités des conservatoires de l’abeille noire en France, consultez la page http://www.abeille-noire.org/liste-des-conservatoires.html.

Créer des espaces fleuris

Les abeilles sont des insectes qui s’alimentent de pollen et de nectar. Le pollen – riche en protéines – est à la base de la production de la gelée royale, et il est consommé en grande quantité par les nourrices qui s’occupent du couvain. Le nectar – liquide concentré en glucides – est à la base du miel. Il peut aussi être consommé en l’état par les insectes adultes. Ces sources de sucres sont nécessaires pour que les abeilles gardent leur activité et soient en mesure – l’hiver venu – de conserver une température optimale dans leur nid.

Vous l’avez compris, les abeilles ont besoin de plantes à fleurs pour vivre. Si vous souhaitez leur venir en aide, vous pouvez commencer par planter des massifs et les abords des enclos avec des espèces mellifères.

Toutefois, il faut rechercher des végétaux dont les productions sont intéressantes d’un point de vue nutritif. Les plantes herbacées, les arbres et les arbustes n’ont pas les mêmes qualités d’une espèce à une autre. Certaines espèces produisent des pollens plus riches en protéines que d’autres. Le tilleul et le châtaignier sont intéressants. Les amandiers et les pommiers sont aussi très appréciés. Ces arbres caduques laissent la lumière filtrée en hiver et apportent de l’ombre en été. Les animaux et les visiteurs apprécieront.

Il faut aussi faire un état des lieux des floraisons et sélectionner des espèces qui fleurissent quand les ressources se font rares. L’arbre à miel (Tetradium daniellii) est particulièrement bienvenu, car sa floraison abondante intervient durant les mois les plus chauds de l’année (en juillet et en août), lorsque les floraisons des espèces locales se sont rares. Les sedums sont des plantes herbacées très appréciées des insectes butineurs. Beaucoup fleurissent à la fin de l’été, durant le mois de septembre. Cette époque est très importance pour les colonies, car les abeilles auront sans doute besoin de compléter leurs réserves en vu de l’hivernage.

Mais attention, si vous voulez aider les insectes pollinisateurs à trouver davantage de nourriture, vous devez mettre les insecticides et autres pesticides au placard. Car ces produits sont de redoutables poisons capables d’intoxiquer toute une colonie. Un vrai travail de communication s’impose, si les soins faits aux plantes sont effectués par un autre service que le vôtre.

Installer un rucher dans le zoo

En France, il est relativement facile d’installer des ruches. Pour preuve, on trouve même des ruches en plein Paris, dans les jardins publics, sur les balcons et sur les terrasses des immeubles. Le plus important est de :

  • déclarer ses ruches à l’administration
  • prendre une assurance complémentaire
  • respecter les distances minimales entre les ruches et les lieux de passage

Un zoo est un endroit très fréquenté. La distance entre les visiteurs et les ruches doit être suffisante pour éviter d’éventuels problèmes. Car, n’oublions pas que les abeilles sont capables de piquer et certaines sous-espèces expriment un caractère défensif marqué.

Un ruche permet de recevoir une colonie de plusieurs dizaines de milliers d’insectes. L’activité est particulièrement forte au printemps lorsque les ressources florales sont importantes. Source : Pixabay.

Le législateur a toutefois bien fait les choses. Les distances de sécurité entre les ruches et les lieux de passage ou le voisinage n’ont plus à être prises en compte dès lors que vos colonies sont isolées par une haie vive ou une palissade de deux mètres de hauteur.

Néanmoins, et vu le statut très particulier les parcs zoologiques en France, il est préférable de vous adresser à votre DDPP avant d’entreprendre l’installation d’une ou de plusieurs ruches sur l’établissement.

Prenez soin de vos abeilles

À bien des égards, les abeilles sont capables de se débrouiller par elles-même pour collecter du miel et du nectar, ou bien pour s’occuper de leur couvain. L’observation de leur comportement est fascinant, et les visiteurs de votre zoo seront très intéressés d’en apprendre davantage à leur sujet.

Mais il est irréalisable de laisser les abeilles sans une surveillance et des soins adaptés. Dès lors qu’un essaim trouve son habitation dans une ruche, il n’est plus soumis aux mêmes conditions que dans la nature. Il faudra veuillez à son confort en ajustant les dimensions mises à disposition : ajout de cadre pour que les abeilles bâtissent des rayons de cire, ajout d’un hausse pour qu’elles puissent stocker le miel durant les périodes de fortes activités des butineuses,…

Il faudra aussi surveiller l’apparition de maladies et de parasites. Le plus gros problème vient des infestations de varroas (Varroa destructor). Ces parasites se fixent sur les larves et sur les abeilles adultes, et ils les ponctionnent de leurs réserves. En quelques semaines ou mois, une colonie peut être décimée. Heureusement, il existe des traitements adaptés. Mais il est nécessaire – comme pour tous les aspects de l’apiculture – de bien se former pour intervenir à temps et de la juste manière.

N’improvisez-pas, formez-vous !

Lorsqu’il s’agit l’élevage – l’apiculture est une activité d’éleveur – il est impossible d’improviser. Comme nous l’avons abordé, il est nécessaire tout au long de l’année de surveiller l’état sanitaire de vos colonies, d’ajouter des éléments à la ruche (cadres et hausses), de pratiquer un ajout de sirop en cas de disette,… Il faut donc savoir quoi faire et comment le faire.

Bien entendu, vous devrez suivre une formation pratique auprès d’un apiculteur expérimenté. Peut-être avez-vous la chance de l’être vous-même ou bien l’un de vos collègue soigneur animalier l’est-il ? Dans le cas contraire, il reste possible d’être formé par un apiculteur exploitant ou bien exerçant au sein d’un rucher école.

les ruchers-écoles sont des structures le plus souvent associatives qui organisent des formations pour s’initier et progresser en apiculture. Vous trouverez probablement un rucher école à proximité de chez vous. Ces formations ont souvent lieu durant le printemps sous la forme de stages de quelques jours. Ou bien sous la forme de tutorat tout au long de la saison apicole, de mars à septembre.

L’enseignement de la pratique passe par des stages auprès d’apiculteurs expérimentés. C’est le moyen le plus rapide d’acquérir les bons gestes et de vaincre son appréhension. Source : Pixabay.

Vous pouvez aussi trouver intérêt à recevoir un enseignement théoriques approfondi. L’apiculture et le monde des abeilles sont passionnants. Et vous avez tout intérêt à devenir un expert pour renseigner les visiteurs et pourquoi pas animer des ateliers pédagogiques. Certains ruchers écoles organisent des conférences qui présentent des aspects de la biologie et de l’écologie des abeilles.

Mais il est aussi possible de se former à distance. Une formation en apiculture par visioconférences est organisée par IDLWT. Elle se compose de plusieurs modules thématiques. Durant cette formation, des experts présentes des visioconférences aux apprenants. Ces actions se déroulent en direct et les apprenants peuvent interagir et poser leurs questions. Cette formation s’adresse aux néophytes qui veulent compléter leurs connaissances avant d’installer un rucher et aux apiculteurs débutants, et plus largement à tous les naturalistes. Pour en savoir davantage rendez-vous maintenant sur www.apiculture.idlwt.com

Le directeur sera t-il intéressé ?

Bien souvent, lorsque l’on est soigneur animalier, la décision d’accueillir une espèce ou une autre, revient au directeur ou au responsable animalier. Si vous n’avez pas de pouvoir de décision, il vous reste encore la possibilité d’informer vos encadrants sur l’intérêt d’installer des colonies d’abeilles dans le zoo. Les meilleurs arguments sont :

  • Les abeilles ont beaucoup de succès auprès du public
  • Il est possible d’organiser des animations pédagogiques pour tous les visiteurs (scolaires, familles,…)
  • Les abeilles mellifères sont classées comme espèces domestiques et ne nécessitent pas un certificat de capacité de présentation au public
  • L’investissement pour mettre en place un rucher de quelques ruches n’est pas trop élevé (comptez 200 à 250 euros par ruche peuplée, puis 150 euros de matériel)

Voici pour une rapide présentation de l’apiculture et de ses possibilités au sein d’un parc zoologique. Nous espérons que sa lecture vous aura été agréable. Nous vous souhaitons bonne continuation dans vos projets animaliers.